La compassion

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La liturgie de l'Église nous présente en ce dimanche de septembre une parabole bien connue par plusieurs d’entre nous. L'évangéliste Matthieu est le seul à la rapporter.  On peut se demander pourquoi. Il est important de se rappeler que la communauté chrétienne de Matthieu était principalement composée de Juifs convertis depuis les premiers temps, ainsi que d'étrangers qui se sont joints plus tard, dont d'anciens persécuteurs de la foi. Il est facile d'imaginer que des tensions ont émergé rapidement entre les chrétiens de longue date et les nouveaux convertis. Dans ce contexte difficile, comment pouvait-on faire comprendre aux premiers convertis qu'ils n'étaient ni meilleurs ni moins bons que les autres ?  C’est dans les paroles de Jésus que Matthieu a trouvé les mots qu’il fallait pour apaiser les tensions dans sa communauté.

La parabole de Jésus nous offre une leçon précieuse sur la compassion de Dieu : une compassion qui s'exprime sans tenir compte de notre statut social ou de nos mérites. Cette compassion n'est pas innée en nous, comme en témoigne la réaction des ouvriers de la première heure. Pour Jésus, cette parabole met en lumière deux visions du monde radicalement différentes. D'un côté, il y a la vision où l'économie est impitoyable : les premiers restent les premiers, et les derniers restent les derniers. Dans cette perspective, trop souvent le bonheur réside dans l'accumulation et la possession de biens. De l'autre côté, il y a une vision du monde où le bonheur réside dans le partage. La compassion, par sa nature même, telle que le maître du domaine l'a ressentie, est une émotion qui nous touche au plus profond de notre être. Alors, les calculs aux mérites deviennent superflus. Tous les parents du monde ont fait l'expérience de cette émotion un jour envers leurs enfants.

Devant Dieu, nous nous abaissons au rang de simples travailleurs, alors qu'Il aspire à nous élever au rang de fils et de filles. La reconnaissance de Dieu ne s'achète pas, elle se reçoit comme un don, comme un précieux cadeau. Cette magnifique parabole nous rappelle que Dieu n'accorde pas de faveurs en fonction de nos performances, car en Jésus, il nous propose une tout autre vision du monde. Il appartient désormais à nous, chrétiens et chrétiennes, de partager et d'incarner cette vision dans nos vies. Bonne semaine !

Yvan Demers, coordonnateur
Secteur pastoral Bellevue